26 juin 2006

Spla$h 'n Gun$ : les gangsters se mouillent


Sébastien, l'homme derrière eludique, a eu l'idée d'un petit sondage visant à élire le jeu de l'été. Et bien tous ceux qui s'attendaient à des Citadelles et autres Carcassonne se retrouvent aujourd'hui le bec à l'eau. En effet, le jeu qui a été très justement acclamé jeu fun de l'été est issu du croisement de l'imagination fertile de j-master (sur Tric-Trac) et du Ca$h'n Gun$ de Ludovic Maublanc. Le résultat, baptisé Spla$h'n Gun$ invite les joueurs à troquer leurs fusils en mousse pour des pistolets à eau. Humidité et plaisir garantis! La règle ne dit pas comment protéger le reste du matériel, carton et eau ne faisant pas vraiment bon ménage, mais je suis certain qu'on doit pouvoir trouver une solution. Un jeu à essayer quand on a envie de refroidir quelqu'un!

(Source: eludique)

22 juin 2006

Étude comparative des jeux d'aventure


Shannon Appelcline remet ça, cette fois il s'amuse à comparer trois des principaux jeux d'aventure récemment publiés par Fantasy Flight. Sa définition d'un jeu d'aventure? Un jeu de rôle sur plateau. Plus précisément, un jeu de société où chaque joueur incarne un personnage qui évolue lentement en cours de partie. Des monstres apparaîssent soit aléatoirement, soit suivant un schéma prédéterminé. En les attaquant les joueurs acquièrent des récompenses et de l'expérience.

D'après lui, ce genre, après avoir connu dans le passé des succès tels que Talisman ou HeroQuest, est entrain d'être réhabilité par Fantasy Flight Games. Dans son article, Appelcline s'attarde d'ailleurs à comparer trois jeux d'aventure parus chez cet éditeur: Arkham Horror, Runebound et World of Warcraft. Les critères de comparaison qu'il a retenus sont les suivants:

  • Compteurs d'énergie (endurance, santé, etc.)
  • Statistiques de combat
  • Autres statistiques
  • Équipement
  • Expérience
  • Résolution de défis d'habileté
  • Création de monstres
  • Mécanismes de combat
  • Mouvement
  • Événements
  • Équipes
  • Systèmes uniques
Son analyse est pertinente et fait bien ressortir les points communs et les différences entre ces trois jeux. Il serait intéressant d'étendre l'exercice à d'autres jeux d'aventure, et en particulier à ceux qui exigent la présence d'un meneur de jeu tels que Doom ou Descent.

De mon côté, ma conclusion est que ce genre est encore bien peu exploré. En particulier, les jeux d'aventure "à la sauce européenne" sont pratiquement inexistants. Teuber s'y est déjà essayé avec Candamir: The First Settlers mais j'ai l'impression qu'on peut aller plus loin. En tous cas, c'est un genre à suivre!

NOTE: Appelcline a publié une suite à son premier article. À lire!

(Source: Gone Gaming)

20 juin 2006

Les jeux et la littérature -- L'auteur


J'ai l'impression que la littérature et le monde ludique représentent deux extrêmes en regard de la place accordée à l'auteur, surtout au niveau du public. Certains professeurs aiment tellement leur cher Baudelaire qu'ils en oublient ses fleurs et son spleen parisien.

Victor Hugo
Victor Hugo
Le lectorat moyen suit aveuglément un auteur, même si la qualité ne se présente pas toujours au rendez-vous. Par contre, rares sont les gens, en dehors d'une communauté restreinte de fanatiques, capables de nommer un seul créateur de jeu! Qui connaît l'auteur du Monopoly? Presque personne! Existe-t-il un jeu plus répandu dans la société occidentale? Molière, Victor Hugo et Émile Nelligan (au Québec du moins) représentent pourtant des noms largement connus... et l'on joue davantage au Monopoly qu'on ne lit Molière!

Émile Nelligan
Émile Nelligan
Jusqu'à tout récemment, on accordait très peu d'importance à la paternité d'une oeuvre ludique. Pourquoi? Je ne sais vraiment pas. La biographie de Nelligan, notre poète maudit, nous permet de comprendre bien des éléments de ses poèmes : sa relation ambiguë avec sa mère, sa connaissance de l'anglais et son goût pour Edgar Allan Poe, son ton tragique et mélancolique, etc. Reiner Knizia travaillait dans le domaine des mathématiques, ce savoir donne accès à une meilleure compréhension de ses jeux. De Crazy Derby à Samouraï, en passant par Pickomino, on constate l'importance des nombres.

Molière
Molière
On peut simplement étudier l'ensemble de l'oeuvre. Comment les différents opus se répondent-ils? Y a-t-il une évolution dans la vision du monde proposée? Proust n'est-il pas plus serein dans les dernières pages de À la Recherche du temps perdu? Au contraire, retrouve-t-on des constantes? Alfred Desrochers, poète estrien, disait que les écrivains n'avaient que deux ou trois bonnes chansons qu'ils faisaient tourner encore et encore. Jacques Poulin demeure sans doute le champion de l'homogénéité romanesque. Pratiquement tous ses romans contiennent un camion Wolkswagen, un personnage écrivain, un personnage nommé Jack (!), des chats, beaucoup de café, une route à parcourir et le " Vieux Québec ". Quand on lit l'intégral de Molière ou de Zola, on constate la présence de schèmes narratifs récurrents.
Kris Burm
Kris Burm
Chez le dramaturge, c'est généralement l'histoire d'amour impossible entre deux jeunes gens, parce qu'un vieillard en position d'autorité refuse d'autoriser le mariage pour des conditions monétaires. Le romancier nous montre, pour sa part, l'histoire d'une famille dont chaque membre a hérité d'une tare qui le mène invariablement à sa perte... Les auteurs de jeux ne démontrent-ils pas des tics semblables? Bruno Faidutti aime le chaos et les fameuses " cartes-événements ", Serge Laget préfère les univers réglés et structurés. Kris Burm produit le type de jeux que vous savez, Kramer et Kiesling usent beaucoup du système de points d'action (Java, Tikal...). Reiner Knizia a une façon bien particulière de déterminer le gagnant.
Klaus Teuber
Klaus Teuber
Pierre Poissant nous a appris que Klaus Teuber visait l'évolution dans la continuité. Richard coeur de lion, Colons de Catane et Nouveaux mondes ne formaient qu'un seul gros jeux à l'origine. Les joueurs exploraient d'abord un archipel. Ensuite ils colonisaient une de ses îles pour enfin construire une grande cité sur celle-ci. Le projet ayant été jugé trop ambitieux, Teuber l'a découpé en trois parties à peu près égales. Richard Borg affectionne le thème de la guerre tandis que Sylvie Barc se consacre davantage aux " petits jeux simples et drôles à jouer entre amis ". Il arrive bien entendu que les créateurs dérogent à leurs habitudes, Bruno Faidutti a participé à la nouvelle version de Warriors Knights, mais si j'ai bien compris les règles, il a trouvé le moyen de " chaotiser " l'ordre des actions par un système de cartes.

Reiner Knizia
Reiner Knizia
Bien entendu, l'étudiant en littérature s'intéressera aux sources d'inspiration d'un auteur. On prend pour acquis qu'aucune oeuvre ne surgit du vide, que tout texte résulte d'un contexte, social et historique bien entendu, mais également littéraire. Ainsi, on doit se demander quelle est la mode à l'époque de l'auteur? Les grandes tendances? Qui sont les modèles de l'auteur étudié? En retrouve-t-on des traces? Y a-t-il des références, implicites ou explicites? Dans notre époque dite post-moderne, une ou plusieurs citations précèdent pratiquement tous les textes. De cette façon, un écrivain révèle soit ses sources ou son style; il éclaire également sur le sens qu'il donne à son livre. Un créateur de jeu vit-il une situation semblable? Bien entendu! La plus belle preuve se trouve sans doute à la fin des règlements de la dernière mouture de Twilight Imperium, la troisième. Christian (quel nom!) T. Peterson nous livre non seulement une histoire de cet opus en train de devenir LA référence du " gros jeu américain ", mais aussi les problèmes ludiques qu'il désirait régler et les jeux (européens) qui l'ont aidé à accomplir cette tâche : Verrater, Citadelles, El Grande, Vinci et Puerto Rico. Ces noms, bien connus, lui ont inspiré la solution, les cartes stratégiques, qui donnent une action " principale " au joueur actif et une action " secondaire " aux autres, en plus du système de valeur ajoutée pour les rôles non choisis. Je vous recommande fortement cette lecture. Le livret de règles est disponible sur le site de Fantasy Flight Games.
Serge Laget
Serge Laget
Par ailleurs, le Mare nostrum de Serge Laget représente, à ce qu'on dit, une version " jouable " des anciens jeux qui sont aujourd'hui trop lourds, plus particulièrement Civilisation. On retrouve cette sempiternelle Méditerranée, les emplacements pour les villes, les différentes ressources, qu'il ne faut plus accumuler mais diversifier, la phase d'échanges et les combats qui n'apportent pas directement la victoire. Également, son livret d'instruction nous renseigne. M. Laget joue aux échecs, où il faut mettre rapidement ses pièces en action pour couvrir un maximum de cases et protéger celles qui doivent l'être. Il en va de même avec Mare nostrum, car en raison du manque voulu d'unités militaires, on mise sur la peur d'une attaque plutôt que sur sa réalisation. C'est beaucoup plus subtil qu'un simple Warcraft. Enfin, on apprend encore que " l'auteur s'intéresse surtout aux relations qui se créent entre les joueurs à travers les mécanismes de jeu ". Ici encore, les règlements forcent le développement de ces " relations " et on ne peut terminer une partie sans avoir beaucoup discuté (enfin dans mon cas!).

Bruno Faidutti
Bruno Faidutti
Quoi d'autre? Le processus de création lui-même! Oubliez les stéréotypes du poète enfermé dans sa bulle, séparé du reste du monde par une incompréhension réciproque. Les écrivains vivent bel et bien dans le monde réel et reçoivent l'aide de plusieurs personnes : amis, confrères, éditeurs, lecteurs. Tout comme n'importe quel génie du monde ludique a besoin d'une solide équipe de testeurs, voire d'un partenaire qui complètera une bonne amorce manquant de finition. Bruno Faidutti (encore lui?!) disait justement qu'il travaillerait de plus en plus en collaboration. Il me semble que le nombre de créations collectives augmente ces temps-ci. D'ailleurs, les artistes se rassemblent fréquemment pour donner naissance à mouvement, qui produira un manifeste ou une revue littéraire. Et si vous avez l'impression que le métier d'écrivain s'accomplit chaque jour dans la joie et la facilité, vous vous trompez. Tous, sans exception, s'arrachent les cheveux pour trouver le mot juste, une intrigue qui tient debout, un personnage " vrai ", un rythme soutenu, un style captivant. Créer un jeu pose des problèmes très proches... Un thème qui colle, une mécanique nouvelle, etc.

En conclusion, il me semble avoir proposé plusieurs pistes d'analyse qui permettraient à quiconque le désirant d'approfondir ses connaissances et sa compréhension du monde du jeu, ce que nous cherchons à réaliser, sur ce blogue.

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16 juin 2006

Le JSP Project, une bonne idée mal exploitée?


JSP, c'est l'acronyme sympathique qu'on a donné à la revue Jeux sur un Plateau. Celle-ci, assez récente, s'est taillée une place de choix parmi les publications papier francophones traitant de jeu de société. Si elle est aujourd'hui très appréciée des joueurs c'est qu'elle a su, d'une part, s'adapter à leur demande et, d'autre part, innover constamment en proposant un contenu parfois inusité.

Parmi ces innovations, celle qui m'aura le plus intriguée reste le JSP Project. Ce concours de création ne demandait pas aux participants de concocter le meilleur jeu possible, mais bien le plus susceptible de se faire éditer dans la gamme de Days of Wonder ou Asmodée.

Bien que je n'aie pas participé au concours, j'étais emballé par l'idée. En effet, il semble qu'un problème récurrent chez les éditeurs actuels soit de trouver le temps de recevoir, de tester et de filtrer les soumissions prometteuses. Certains, comme Fantasy Flight Games, vont jusqu'à refuser toute soumission de jeu non-sollicitée. Une tendance que Aldie et Derk, sur Geekspeak, ont associée à l'avènement d'une époque où les auteurs de jeu seraient de véritables professionnels misant sur leurs succès passés et leur notoriété pour trouver un éditeur.

Dans un tel contexte, donc, le JSP project apparaîssait comme une merveilleuse façon de diminuer le faussé entre les attentes des éditeurs et les élans créatifs des auteurs de jeu émergents. Cependant l'annonce récente qu'aucun des jeux finalistes ne trouvait une place dans la gamme des deux éditeurs est très décevante. Évidemment, on ne peut reprocher son honnêteté à JSP, qui avait dès le début averti les participants de cette possibilité. Cependant, on peut quand même se demander si cette situation n'étais pas évitable ou, à tout le moins, prévisible.

Par exemple, on peut se demander si on a véritablement pris en considération, à chaque étape du concours, les contraintes et attentes des éditeurs partenaires. Si on se fie au verdict du jury, on pourrait croire que non. En effet, on dit que Les croisés du Temps s'adresse à un public trop joueur, que Conflits mythologiques : Egypte fait doublon à côté de L'Âge des Dieux, et que les mécanismes de The secret path of Incas font déjà-vu. Avait-on à se rendre en finale pour constater celà? N'a-t-on pas privilégié les jeux appréciés par les testeurs alors qu'on aurait du s'attarder aux jeux éditables?

À cela on pourra répondre que, de tous les jeux reçus, seuls ceux-ci étaient prometteurs pour l'édition. Dans ce cas, le problème pourrait se situer dans une mauvaise exposition des visées de ce concours. En effet, force est de constater que le
règlement officiel s'attarde longuement aux technicalités mais n'expose aucunement les désirs et contraintes des éditeurs. Je trouve malheureux qu'on ait investi autant d'efforts dans un concours pour, au final, rejeter des jeux sur la base de considérations qui auraient pu être exposées dès le début.

J'espère donc que le concours sera de retour l'an prochain malgré ce résultat un peu décevant. Si c'est le cas, je suggère aux organisateurs d'en faire une occasion de rapprocher les auteurs et les éditeurs. Par exemple, je suis certain que les participants aimeraient lire une entrevue
décrivant la façon dont les décideurs de Days of Wonder et Asmodée choisissent les jeux à éditer. À défaut, prenez au moins la peine de mentionner que vous cherchez des mécaniques innovantes et des jeux familiaux qui se distinguent des autres publiés par les partenaires du concours, ça évitera la déception qu'on connaît aujourd'hui!

14 juin 2006

Les jeux et la littérature -- Une même étude


J'ai étudié la littérature pendant cinq ans (bac et maîtrise), abordant plusieurs aspects de façon générale. Je ne suis pas un spécialiste d'aucune branche; j'ai touché un peu à tout : histoire littéraire, sociologie, sémiologie, étude d'un genre, création, édition, supercheries. Je croyais que ces notions ne me serviraient que dans un cadre restreint... Comme je me trompais! Si une chose m'a frappé quand j'ai redécouvert le monde des jeux, à l'hiver 2004, c'est bien sa ressemblance avec ma discipline. En effet, on peut établir un nombre impressionnant de parallèles.

Quel genre de parallèle? Prenons un livre; il a forcément un auteur, un éditeur, peut-être fait-il partie d'une collection. Ce livre, il a été, à sa sortie, une nouveauté, attendue ou pas, a obtenu (ou pas) un certain succès, a reçu des critiques, du public et des spécialistes, s'est retrouvé dans des salons de livres, des foires. Il a ses mécanismes, ses figures de style, est situable dans un champ de production, dans des contextes historique, sociologiques et de production. Il s'inscrit dans une histoire littéraire : avant, pendant, après la modernité, si post-modernité il y a. De plus, il s'incarne dans un genre, poésie, théâtre, essai, roman, BD, comme on retrouve des jeux de différents types (enchères, majorité, etc.). Enfin, l'aspect physique occupe aussi une place importante : couvertures rigides, formats de poche, couleurs, qualité du papier. Ne parle-t-on pas du matériel d'un jeu Days of Wonder comme des jaquettes qui ornent les montagnes de nouveautés dans les librairies? Bref, pratiquement tout ce que j'ai pu étudier, ce que je viens de nommer, tous mes outils d'analyse littéraire s'appliquent également pour un jeu! En fait, la seule différence réside justement dans le fait que l'on n'enseigne pas les jeux à l'école parce qu'ils ne font pas partie de la culture officielle, ils n'ont pas atteint la reconnaissance des livres. Le jeu est-il si répandu, si commun, qu'on ne le voit plus?

Je me propose donc, très humblement, dans les prochains articles, de vous montrer comment les études littéraires nous aident à mieux comprendre le jeu.

[ Table des matières, Suite ]

08 juin 2006

L'empire des frères Hassenfeld


Qu'ont en commun Milton Bradley, Parker Brothers, Avalon Hill, Wizards of the Coast, TSR et Coleco? Ils ont tous été achetés, directement ou non par la corporation fondée par les Hassenfeld Brothers.

Cette compagnie, qu'on connaît mieux sous le nom de Hasbro, occupe aujourd'hui la plus grande part du marché des jeux de société. D'après Shannon Appelcline, elle contrôle en fait plus de 80% de l'industrie du jeu. C'est entre autre ce que l'on peut apprendre à la lecture de son excellent article sur Gone Gaming.

Vous comprendrez mieux en consultant le superbe tableau qui accompagne l'article et récapitule les principales acquisitions d'Hasbro dans le monde des jeux de société. Appelcline étudie aussi les rôles tenus par les différentes divisions de la méga-corporation: Milton Bradley qui s'oriente de plus en plus dans les jeux pour enfants, Wizards of the Coast qui conserve sa main-mise sur les jeux de rôles et les jeux de cartes à collectionner, puis Avalon Hill qui occupe le crénau des jeux de niche.

Un article truffé de faits intéressants analysés avec soin et intelligence. Pour peu que vous compreniez la langue de Shakespeare, c'est un détour qu'il vous faut faire!

03 juin 2006

Sur un plateau -- Rick Thornquist


Ceux qui me connaisse savent que je me plains souvent de ma malchance dans les jeux. Et bien ce n'est pas le cas pour mes voyages. En effet, par pur hasard la petite maison que nous avons louée se trouve à 2 minutes de marche de l'endroit où réside Rick Thornquist, le reporteur canadien de jeux de société. Moi qui voulais profiter de ma visite à Vancouver pour le contacter et ainsi lancer une série d'entrevues que je souhaite faire depuis longtemps, je peux dire que je suis comblé!

Donc, que vous connaissiez bien le travail de Rick ou que vous souhaitiez découvrir une personne chaleureuse et sympathique, je crois que cette entrevue vous plaira. De mon côté j'ai eu beaucoup de plaisir à la faire!

Biographie

Rick joue depuis qu'il a appris à déplacer un pion. Il a fait ses premiers pas dans l'univers du jeu à travers les classiques jeux commerciaux américains avant de migrer vers les wargames, une obsession qui a continué de croître à l'adolescence. Au début de la vingtaine, son travail a pris le dessus et les jeux se sont vus relégués à l'arrière-plan. Il y a quelques années, Tikal l'a amené vers le merveilleux monde des jeux allemands, et peu de temps après il a contribué à l'organisation des Terminal City Gamers à Vancouver - le premier club de jeu de Vancouver.

Les débuts de Rick en tant que journaliste des jeux de société s'est fait en janvier 2002 alors qu'il assumait les fonction d'éditeur pour le site web des Terminal City Gamers, qu'il a alors transformé en un centre de diffusion d'informations quotidiennes sur le monde du jeu. Il a ensuite prêté ses talents à la chronique GameWire sur Gamefest et a poursuivi son travail de reporteur pendant deux ans sur ce site. Un autre déménagement a suivi, cette fois pour créer et devenir éditeur de Boardgame News - le dernier né des sites web d'information sur le monde des jeux.

Rick vit à Vancouver, Colombie-Britannique, Canada.

Rick Thornquist dans son bureau, l'épicentre de Boardgame News.
(Cliquez ici pour agrandir.)

Entrevue

Philippe Beaudoin: Bonjour Rick, et merci de nous accorder cette entrevue. Depuis quelques années déjà, on vous connaît à travers le monde comme une des principales sources d'informations sur les jeux de société. Comment cette passion pour le jeu en est venue à croiser votre talent de reporteur?

Rick Thornquist:
En fait, je n'ai jamais su que j'avais quelque talent de reporteur que ce soit avant de commencer à être journaliste de jeux. Dans ma vie professionnelle, j'étais en fait programmeur et je n'ai jamais fait aucun travail journalistique avant de le faire pour les jeux. Dans ce temps, je n'écrivais que très peu - tous mes écrits étaient dans un langage de programmation, pas en anglais!

Ma carrière de journaliste de jeu a débuté quand j'ai repris le site web de notre groupe de jeu local, les Terminal City Gamers. J'ai commencé à écrire et poster de courtes nouvelles que je jugeais d'intérêt pour les lecteurs du site qui, au début, n'étaient que les membres du groupe. J'ai découvert que j'appréciais vraiment le travail de reporteur et me suis promis de poster au moins une nouvelle par jour. Avant longtemps, des gens extérieurs au groupe ont commencé à consulter le site. De mon côté, j'ai commencé à étendre les sujets que je couvrais et un jour j'ai réalisé que j'étais devenu reporteur! Ce n'était pas mon objectif quand j'ai commencé ce site - c'est arrivé naturellement. Plus de quatre ans plus tard, je le fais toujours.

PB: Donc aujourd'hui, est-ce que vous considérez votre rôle d'éditeur de Boardgame News comme votre travail à temps-plein, ou êtes-vous toujours programmeur?

RT:
Mon travail à temps-plein est d'être l'éditeur de Boardgame News. Je fais occasionellement un peu de programmation, mais c'est de moins en moins fréquent. Mes journées (et parfois mes nuits) sont consacrées au journalisme de jeu.

PB: C'est génial de pouvoir convertir une passion pour le hobby en travail à temps plein, et je parie que plusieurs vous envie, moi le premier. Y-a-t-il quelques dangers à cette entreprise? En particulier, est-ce que votre passion pour les jeux de société a diminiué depuis que vous assumez le rôle de reporteur à temps-plein?

RT:
Le plus grand danger c'est que je ne fais pas autant d'argent que lorsque j'étais programmeur. Plutôt une mince fraction, en fait!

Je dirais que ma passion pour les jeux a un peu diminué, mais c'était à prévoir. Quand j'ai débuté dans ce hobby et que j'ai commencé à agir comme reporteur, je trouvais la nouveauté très excitante. Aujourd'hui, l'aspect nouveauté s'est un peu estompé, mais j'adore toujours les jeux de société.

PB: Je sais que certains trouvent étrange que Rick Thornquist, un des reporteurs de jeu les plus actifs du web, soit canadien. Particulièrement quand on considère que la scène canadienne du jeu de société semble beaucoup moins active que ses contreparties européennes ou américaines. Il suffit d'une rapide visite sur les pages Convention Calendar ou Club Information de Boardgame News pour s'en convaincre. Diriez-vous que vous êtes devenu reporteur car vous manquiez de personnes avec qui jouer? ;)

RT:
Pas du tout! :) En réalité, je pouvais jouer avec un grand nombre de personnes quand j'ai commencé comme reporteur, quoi qu'aujourd'hui ce nombre est beaucoup plus important. Ces temps-ci, je pourrais jouer à chaque jour de la semaine si je le souhaitais - et parfois je le fais!

Je sais que certains trouvent étrange que je sois canadien - la plupart assument simplement que je suis américain. C'est un peu la même chose pour Tom Vasel - plusieurs sont surpris d'apprendre qu'il vit en Corée. Grâce à Internet, des gens d'à peu près partout peuvent contribuer à la communauté en-ligne des joueurs de société et Tom et moi-même en avons tiré avantage.

Tant que j'ai un ordinateur, accès à Internet, et accès à des jeux et des adversaire, je peux faire ce travail. J'adore Vancouver et je peux très bien faire mon travail d'ici. Le seul désavantage d'être au Canada c'est que je n'ai pas la même facilité d'accès aux éditeurs de jeux européens que les reporteurs de là-bas. Heureusement, j'ai de très bons contacts en europe, comme Knut-Michael Wolf de Spielbox et Erwin Broens de Bordspel, qui me relaient souvent un scoop de l'Allemagne ou d'ailleurs.

PB: Quelque chose me dit que les joueurs qui vous entourent apprécient aussi que vous receviez ces "scoops"... Je ne vous ai rencontré qu'une seule fois et j'ai déjà eu la chance de voir trois jeux dont j'ignorais même qu'ils étaient rendus de notre côté de l'Atlantique! Ce qui m'amène à ma prochaine question... Jouez-vous uniquement aux plus récentes nouveautés ou trouvez-vous encore le temps de revenir aux classiques?

RT:
Je reçois en effet beaucoup de copies de jeux pré-publication, en plus de recevoir des jeux allemands avant qu'ils ne soient largement disponibles. Ça fait de moi un joueur assez populaire.

Je joue beaucoup avec ces nouveautés, pour plusieurs raisons. Je veux en connaître le plus possible sur les jeux qu'on retrouve sur les tablettes, en plus j'écris souvent des critiques des jeux nouvellement publiés. Je suis aussi sur le comité des International Gamers Awards, donc je souhaite avoir joué au plus de jeux possible avant d'essayer de choisir ce que je crois être le meilleur jeu de l'année.

Ceci étant dit, je retourne aux jeux classiques dès que je peux. Il y a certains titres magnifiques et je ne pourrais tout simplement pas les laisser sur les tablettes. Particulièrement durant les conventions, quand j'ai plus de temps pour jouer, je joue à beaucoup de classiques.


PB: Aaah... Les conventions! Vous semblez vraiment du genre à participer à beaucoup de conventions... Comment parvenez-vous à trouver le temps et l'énergie pour voyager à gauche et à droite pour jouer à des jeux?

RT:
J'assiste en effet à plusieurs conventions. Comme je les aime beaucoup, il m'est facile de trouver le temps et l'énergie pour y aller. Normalement, je joue quelques soirs par semaine - lors d'une convention j'ai l'opportunité de pratiquer des jeux de société toute la journée et toute la nuit pendant des jours!

Certains penseront que c'est peut-être trop, mais j'ai toujours adoré ça. Quand j'ai assisté à mon premier Gathering of Friends - une convention de jeu organisée par l'auteur Alan Moon - les gens disaient que je ne serais plus capable de voir un jeu après les avoir pratiquer pendant neuf jours. Le contraire s'est produit - après neuf jours je ne voulais plus partir!

Les conventions sont de superbes endroits pour rencontrer beaucoup de personnes qui n'étaient avant que des noms sur Internet. Je me suis fait beaucoup, beaucoup de nouveaux amis lors de ces événements et j'ai hâte de les revoir à la prochaine convention. Lors de ces conventions vous pouvez aussi rencontrer des auteurs de jeux et des éditeurs, ce qui est toujours un plaisir. Un autre aspect positif est qu'elles nous offrent la chance d'essayer de tous nouveaux jeux, et je suis toujours partant pour ça.

PB: Comme on parle de conventions, saviez-vous que la communauté des joueurs de société de Montréal et de la province de Québec connaîssait une croissance phénoménale ces temps-ci? On y organise annuellement une demi-douzaine de conventions, qui attirent souvent plus d'une centaine d'amateurs. Ces nombres peuvent sembler petits lorsqu'on les compare à ce à quoi vous êtes habitué, mais ils restent impressionnants quand on sait qu'il y a trois ans on ne trouvait aucune réunion du genre! Donc... Serait-il possible de vous convaincre de nous visiter, un jour, pour l'une de ces conventions? Et vous pourriez profiter de l'occasion pour vous procurer quelques-uns de ces rares jeux français qu'on ne trouve qu'au Valet d'Coeur!

RT:
C'est impressionant de constater l'essor du jeu de société - j'entends constamment parler de plus en plus de conventions. J'adorerais visiter une convention au Québec - il n'en faudrait pas beaucoup pour me convaincre! Le seul problème c'est le temps et l'argent - j'assiste déjà à tant de conventions.

J'aimerais aussi beaucoup choisir quelques jeux français du Valet d'Coeur. En fait, je m'attends à y commander quelques jeux bientôt. J'ai récemment joué à Deluxe Camping et Du Balai et je souhaite me les procurer. Ces jeux ainsi que d'autres jeux français ne sont pas aussi bien connus qu'ils ne devraient l'être, malheureusement. J'espère remédier à cela en mettant sur pied une chronique sur les jeux français sur mon site web. J'ai bon espoir que ça pourrait attirer l'attention sur ces jeux.


PB: Vous dites que les jeux de société sont en plein essor et il est en effet facile de constater que le tableau est bien différent aujourd'hui de ce qu'il était il n'y a que quelques années. Lorsque vous regardez dans votre boule de cristal, que croyez-vous que le futur réserve aux joueurs et à ce hobby dans 10 ou 20 ans d'ici?

RT:
Bonne question! Je dois dire que je n'en ai vraiment aucune idée. J'ai été constamment surpris par les innovations dans le jeu de société au cours de 10 ou 20 dernières années. Il y a vingt ans, les jeux allemands tels que nous les connaissons n'existaient pratiquement pas - aujourd'hui ils constituent une force majeure dans le jeu de société et je ne crois pas que personne n'aurait pu prédire qu'ils deviendraient populaires à ce point.

Une innovation à laquelle je reste attentif concerne les jeux munis d'éléments électroniques comme King Arthur. Ce jeu n'a reçu que des critiques mitigées, mais je crois qu'il y a un bon potentiel dans cette technologie. Il sera intéressant de voir si celle-ci se développera au cours des prochaines années.

Une chose est certaine, je m'attend à ce qu'on continue à voir de très bons nouveaux jeux. À chaque année je crois avoir tout vu et il y a toujours de nouveaux jeux qui me surprennent par leur qualité. De plus en plus de gens créent des jeux et j'ai bien hâte de voir ce qu'ils vont inventer.

PB: Pour conclure cette entrevue, Rick, pouvez-vous nommer un seul jeu, et nous donner une courte explication si vous le souhaitez, pour chacune des cinq catégories aléatoires suivantes?

1)
Un jeu complètement oublié par le comité du Spiel des Jahres?

New England
. En réalité, j'avais prédit que New England remporterait le prix quand il a été publié. Je pensais qu'il s'agissait d'un très bon jeu familial de belle facture - du matériel parfait pour le SdJ. Non seulement il n'a pas gagné, il n'a même pas reçu de nomination et n'apparaîssait pas sur la liste des recommandations! Heureusement, il a éventuellement gagné le prix du jeu de l'année du magasine GAMES.


2)
Le meilleur jeu "européen" publié en amérique?

A Game of Thrones: The Boardgame
. Bien que certains disent qu'il n'est pas si "européen" que ça, étant donné que c'est surtout un wargame, mais ses mécaniques ont clairement subies l'influence des jeux européens. Je pense que c'est un excellent jeu.


3)
Le meilleur jeu pour juger du caractère de ses adversaires?

Rette Sich Wer Kann
- aussi connu sous le nom "The Lifeboat Game". Il s'agit essentiellement d'un jeu de négociation, et assez méchant en plus. On peut vraiment découvrir de quoi les autres ont l'air quand on commence à lancer leurs matelots par-dessus bord. Le jeu est assez difficile à trouver, mais Z-Man Games en présentera une nouvelle version, sous le titre de Lifeboats, plus tard cette année.


4)
Le jeu non-publié que vous attendez le plus?

Question difficile car il y a tellement de jeux non-publiés dont je ne peux pas encore parler. Un que je peux mentionner c'est Race for the Galaxy de Tom Lehmann, qui sera publié par Rio Grande Games. Je n'y ai pas joué, mais j'ai entendu beaucoup de bonnes choses à son sujet et j'ai bien hâte de l'essayer.


5)
Un jeu auquel vous souhaitez jouer, mais auquel personne autour de vous ne veut jouer?

Je ne crois pas qu'il en existe un seul. Je connais beaucoup de joueurs et, bien que certains n'aiment pas un type de jeu, je peux presque toujours trouver des adversaires pour mes jeux préférés. Je dois être chanceux!

PB: Merci beaucoup, Rick, d'avoir pris le temps de répondre à ces questions. Je suis certain que nos lecteurs francophones apprécieront de vous connaître un peu mieux. J'espère vous revoir un jour lors d'une convention québécoise. En attendant, nous allons bien sûr continuer de lire Boardgame News!

RT: Le plaisir était pour moi! J'espère sincèrement visiter une convention québécoise un jour. J'aimerais beaucoup rencontrer tous les joueurs de cette région. Au plaisir de s'y retrouver!

(Entrevue originale en anglais, ma traduction.)

[ Toutes les entrevues ]

Les cousins de Kubb


Ceux d'entre vous qui avez participé au week-end ludo plein-air connaissent le kubb, cet étrange jeu d'extérieur d'origine Viking. Celui-ci a connu un franc succès au cours de cette fin-de-semaine et on y a beaucoup joué.

Et bien, Kubb semble avoir des dizaines de cousins! Du moins, les jeux que présente Ludo le Gars s'en rapprochent parfois beaucoup. Dans son article, on apprend que les jeux d'extérieur constituent l'autre passion de Ludovic Gimet. Ce premier article, non-exhaustif, s'attarde sur les jeux originaires de Bretagne. Il donne donc des images et décrit brièvement les règles de jeux aux noms aussi poétiques que :

  • La galoche sur billot
  • Les palets de route
  • Le birinig
  • Les quilles de plogastel
  • Kilhou bro leon

Un article essentiel pour tous ceux qui ont aimé Kubb ou qui souhaitent découvrir d'autres jeux semblables. On y donne aussi une courte bibliographie et un pointeur vers le FALSAB, qui présente brièvement un grand nombre les jeux traditionnels bretons.

(Source: Ludo le Gars)

01 juin 2006

Lancement québécois de Cléopâtre


Le nouveau jeu de Days of Wonder, Cléopâtre et la Société des Architectes, sera lancé au Québec ce samedi 3 juin à 13h30 dans le cadre de la Journée Ludique de Québec. Ce jeu, créé par Bruno Cathala et Ludovic Maublanc, est doté d'un matériel tout simplement somptueux, même selon les standards déjà élevés de Days of Wonder. Le jeu lui-même a été assez bien accueilli par la critique. Ce lancement sera une très bonne occasion de constater tout ça par vous-même, alors assurez-vous de participer à cet événement qui promet déjà d'être une réussite!